[MUNICIPALES] : À Saint-Martin d’Uriage, des citoyens préparent la transition

Publié le mer 11/03/2020 - 07:57

Le collectif SMU 2020 a organisé une série de plusieurs réunions, au cours des dernières semaines, sur des thématiques telles que la mobilité, l’habitat, ou la participation citoyenne. Crédit photo : Marie Lyan

Par Marie Lyan

Sur l’ensemble de l’hexagone, des collectifs de citoyens s’engagent sur les pas de Rob Hopkins pour conduire leur ville ou leur territoire vers la transition. À l’approche des municipales, certains font le choix de peser de l’extérieur des arcanes de la politique, comme vigies du respect des engagements en faveur de la transition. D’autres s’engagent en présentant leur propre liste. D’une manière ou d’une autre, les défenseurs des villes en transition entendent bien peser sur les débats

Ils sont issus de différents univers, mais tous habitent la commune. Novices en politique, ils se sont retrouvés à la suite d’un appel, lancé par la municipalité sortante, pour porter des mesures en lien avec le Pacte pour la Transition. Une partie d’entre eux ont choisi de s’engager sur une liste, tandis que l’autre moitié continuera de se réunir sous la forme d’un collectif citoyen indépendant.

 Impulser un mouvement pour la transition sociale, écologique et démocratique. Telle était l’ambition du Pacte pour la transition, rédigé par une cinquantaine d'organisations à l’automne dernier, et repris par des élus sortants de Saint-Martin d’Uriage (38). Dans cette commune de 5512 âmes, qui compte près de 20 hameaux, nichés sur le flanc du massif de Belledonne, l’heure semble à l’accélération d’une prise de conscience environnementale et citoyenne.

Car si le maire sortant, Gérald Giraud, était déjà familier des enjeux écologiques en tant qu’ancien chercheur de Météo France et président de l’Ageden*, celui-ci a souhaité faire un pas supplémentaire lors de son appel pour les municipales de 2020.

Car contrairement à d’autres communes, où des listes citoyennes ont émergé du réseau associatif, Saint-Martin d’Uriage a fait la démarche en sens inverse. « L’objectif était de construire une équipe renouvelée et rajeunie afin de préparer l’avenir, tout en redonnant du sens à l’action municipale. Nous souhaitions aussi nous appuyer sur des notions de démocratie participative et de transition écologique», indique Gérald Giraud, qui se dit attentif aux initiatives engagées, à quelques kilomètres de là, par l’élu EELV de Grenoble, Eric Piolle. À ses côtés, l’une de ses adjointes, Cécile Conry, a joué le rôle de cheville ouvrière pour rassembler les citoyens : « Dans le précédent mandat, il existait déjà cette volonté. Mais nous n’avions pas trouvé les dispositifs pour faire participer davantage les citoyens », ajoute-t-elle. C’est désormais chose faite avec ce nouveau collectif, nommé selon les initiales de la commune (SMU 2020), qui rassemble désormais une quarantaine de citoyens (chercheurs, enseignants, aides-soignants, infirmiers, mère de familles, etc).

Parmi eux, Pauline Joppe, une citoyenne déjà engagée dans la création d’un SEL (système d’échange local sur la commune) ainsi que d’un club de découverte à l’environnement destiné aux enfants. Ou encore, des membres du Rucher collectif, tels que Ludovic Mermillod-Blondin et Brigitte Bouret, sympathisante du Mouvement des Coquelicots. « Il semble plus facile de créer ce type de collectif à l’échelle d’une petite commune, où les gens se connaissent », résume Brigitte Bouret. Avec, un engagement non plus basé sur une doctrine politique, mais sur l’ambition d’évoquer les transitions à venir.

Une logique participative

Depuis l’automne dernier, le collectif a planché sur des thématiques telles que la mobilité, l’habitat, ou la participation citoyenne. Il a été accompagné par des intervenants comme la chercheuse au laboratoire Pacte de l’Université Grenoble Alpes, Kirsten Koop, ou la rédactrice en chef de la revue Les quatre saisons, éditée par Terre Vivante, Marie Arnould. Le collectif s’est aussi inspiré d’initiatives d’autres communes comme la ville de Saillans (Drôme), qui a construit son propre schéma de gouvernance en 2015.

 «Le pacte pour la transition sert de colonne vertébrale à notre réflexion, avec la volonté de former tout le monde à la transition, qu’il s’agisse des élus, des agents municipaux ou des citoyens », explique Arnaud Callec, ingénieur écologue et futur candidat sur la liste.

Au fil des réunions, le collectif est parvenu à une centaine de propositions, qui seront ensuite classées, triées et reprises au sein d’une future liste de candidature. Avec, au programme, l’engagement de rendre des terres à l’agriculture, d’augmenter la part du bio dans la cuisine centrale ou encore de doper la participation citoyenne à travers des budgets participatifs et conseils citoyens.

« Nous nous sommes aperçus que nous avions déjà mis en place, à travers ce mandat, une vingtaine de mesures, parfois au niveau 1, 2 ou 3. Mais l’un de nos points faibles était les questions de démocratie participative, qu’il demeurait difficile d’insuffler », analyse le maire sortant.

Vers l’émergence d’un collectif indépendant

Très vite, l’ambition de monter deux entités séparées a émergé : d’un côté, une liste candidate aux élections, et de l’autre, un collectif qui aurait la mission de demeurer indépendant.

« Le collectif va bientôt être déconnecté de la liste afin qu’il vive sa propre vie et devienne une force de propositions », annonce Arnaud Callec. Avec, du côté de la liste qui a été officialisée mi-février, des citoyens désireux d’aller plus loin et qui devraient même devenir majoritaires : car sur les 29 places à pourvoir, seuls 8 élus sortants devraient se positionner. Arnaud Callec est l’un des nouveaux entrants : « j’étais partant pour accompagner l’essor du collectif puis, peu à peu, ma réflexion a mûri. Je me suis dit qu’il y avait matière à m’impliquer davantage ». Même ambition pour Didier Bouvard, professeur d’université. « J’ai été régulièrement impliqué jusqu’ici à travers l’école de musique ou l’association des parents d’élèves et j’étais tenté d’aller plus loin». Lorsqu’on le questionne sur son engagement en faveur de la transition, il n’hésite pas à se décrire comme « le citoyen moyen, qui prend progressivement conscience des problématiques qui se posent et qui essaie d’adapter ses comportements ». Avec l’idée de « voir comment, à l’échelle d’une petite commune, il est possible non pas de sauver la planète, mais de mettre des choses en œuvre ».

Un constat où Brigitte Bouret le rejoint : « Saint-Martin d’Uriage pèse finalement peu sur le bilan carbone global, mais c’est en changeant l’état d’esprit dans les communes que nous pourrons agir. Le Pacte pour la Transition pourrait avoir un effet boule de neige ».

Didier Bouvard est également conscient des limites : « La commune peut impulser et faire du lobbying, même si en pratique, certains enjeux comme la mobilité seront dépendants de la communauté de communes ». Une intercommunalité où Saint-Martin d’Uriage ne disposera que de 3 élus sur 43... Ainsi, les membres du collectif SMU 2020 regardent d’ores et déjà vers l’extérieur afin de partager leur vision avec d’autres collectifs de leur bassin. Avec un objectif : peser, ensemble, lors de la constitution de la future intercommunalité.

*Association pour une Gestion Durable de l'ENergie

Plus d’infos

https://www.collectifsmu2020.fr/

https://www.pacte-transition.org/

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