« Tout est fait pour que les multinationales contrôlent l’information qui les concerne. »

Publié le jeu 30/08/2018 - 11:55

Journaliste pour le pureplayer Bastamag, Olivier Petitjean s’est spécialisé dans l’enquête sur les grandes firmes. Il travaille notamment pour l’Observatoire des multinationales, qui chaque année publie un rapport sur les grandes entreprises françaises. Alors qu’ont récemment éclaté plusieurs scandales à portée internationale – DieseIgate, Panama Papers – il revient pour nous sur les spécificités et les difficultés de son travail.

 

 

 

Comment est né l’Observatoire des multinationales ?

A la base, c’est un projet journalistique, lancé par l’équipe de Bastamag. Assez rapidement, on s’est dit qu’il y avait besoin d’un outil de rassemblement et de synthèse de l’information sur les multinationales françaises, qui puisse servir à tout le monde, aux autres journalistes comme aux citoyens. Le principe, c’est à la fois un travail de veille sur le lobbying, la finance, et un travail d’enquête.

Quelles sont les spécificités du travail d’enquête dans ce milieu-là ?

La difficulté, c’est que tout est fait pour que les multinationales contrôlent l’information qui les concerne. Elles le font grâce à leurs chargés de communication et leurs services de presse. En France, il y a environ un journaliste pour dix communicants. Ensuite, il y a les clauses de confidentialités qui verrouillent l’information, en incitant les salariés à ne pas parler. Il y a une culture de l’omerta. Les multinationales peuvent aussi jouer sur la confusion : par exemple, une entreprise comme Total va développer tout un arsenal de discours pour détourner les accusations de pollution, en mettant l’accent sur des initiatives vertes pour faire diversion. C’est une autre manière de contrôler l’information. Et en dernier recours, il y a les poursuites judiciaires contre les salariés, les lanceurs d’alerte, etc.

Olivier Petitjean, journaliste et membre de l'Observatoire des multinationales - CC / LMDP

Que va changer la nouvelle loi sur le secret des affaires ?

Reste à voir comment cela va être appliqué. Mais c’est potentiellement une nouvelle arme de dissuasion massive pour les multinationales dans la bataille pour l’information. Ce n’est pas un hasard qu’elle soit adoptée maintenant, après tous les scandales récents, sur l’optimisation fiscale par exemple.

Justement, les scandales récents ont montré que les firmes étant transnationales, cela suppose un travail de coopération entre des médias de différents pays. C’est quelque chose de nouveau.

Oui, le travail de coopération est important. Les masses de données à exploiter sont énormes. Même à l’état actuel, les Panama Papers doivent encore receler des « trésors », et il y a encore des gens qui travaillent à temps plein dessus. L’enjeu est mondial, c’est normal qu’on en arrive à des enquêtes et scoops internationaux.

Plus d'infos : www.multinationales.org

 

 

 

 

 

 

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