Par le collectif Paysages de l'après-pétrole
Depuis le milieu du XXe siècle, l’abondance du pétrole et son faible coût ont largement diffusé des pratiques d’aménagement dispendieuses dont les impacts sur le climat et la biodiversité apparaissent aujourd’hui massivement. Nos façons d’habiter, de nous nourrir et de nous déplacer consomment des quantités d’énergie gigantesques. Tant que nous continuons à utiliser principalement des énergies carbonées, nous mettons en danger nos vies sur la terre. Comment engager concrètement et rapidement les évolutions nécessaires ? Prudence environnementale, développement économique, cohésion sociale : comment trouver la voie vers plus de soutenabilité ? Quel dirigeant ne rêve d’un outil capable de réparer les gouffres qui déstabilisent nos sociétés ?
La grande abondance de biens dont jouissent nos sociétés riches ne signifie plus la réussite d’un modèle. Creusement des inégalités économiques, manque de cohésion sociale, impacts écologiques et climatiques menaçants : l’état des lieux fourni par les experts souligne chaque jour les faiblesses de notre mode de développement. Par quoi commencer ?
Réunissant soixante professionnels de l’aménagement, du botaniste et de l’agronome au sociologue et au philosophe en passant par les architectes, urbanistes et paysagistes, le collectif Paysages de l’après-pétrole interroge, dans les villes comme à la campagne, le gaspillage énergétique, l’étalement urbain et les pollutions qui détériorent le milieu naturel. Ces questions sont interdépendantes : l’étalement urbain consomme des terres agricoles, est dispendieux en énergie et impose de coûteux déplacements en voiture. À l’inverse, un urbanisme rural attentif aux savoir-faire locaux économise ces frais. Se substituant aux modes d’exploitation intensifs, l’agro-écologie recrée un paysage respectueux de l’environnement, source d’alimentation de proximité et de nouveaux emplois. En accord avec les initiatives des habitants, la transition énergétique fondée sur l’utilisation des ressources locales et enracinée dans l’identité des territoires réconcilie les populations autour de solutions construites ensemble.
Bien-vivre ensemble
Comme le constate le collectif PAP depuis 2015, il y a moyen de changer ces façons de faire et ces façons de vivre. Il y a moyen de prévoir des modes de vie et des usages plus économes mais aussi plus agréables. Dans les domaines de la transition énergétique, de l’urbanisme comme de l’agriculture, des solutions existent en France et dans le monde, engagées sur les territoires grâce à l’implication de leurs habitants et souvent depuis de longues années.
Les paysages de l’après-pétrole permettent de revitaliser les déshérences périurbaines, de créer des villes mieux adaptées au changement climatique et de repeupler les campagnes qui auront retrouvé leurs lignes d’arbres pour abriter les insectes et des multitudes d’oiseaux.
Les paysages de l’après-pétrole économisent l’énergie, ils la trouvent dans des mix élaborés par et avec les habitants afin de savoir utiliser les ressources renouvelables disponibles localement.
Dans les paysages de l’après-pétrole, l’agriculture sait utiliser les cycles de l’eau, du vent et du soleil pour renouveler les productions et par là le plaisir de vivre.
Les paysages de l’après-pétrole réinventent des formes urbaines sachant donner corps à la démocratie locale et au bien-vivre ensemble.
Le mot de paysage ne sert pas à décrire les seuls espaces naturels, ces étendues immenses où l’homme a peu pénétré, ou bien qu’il a su marquer harmonieusement, à la façon pittoresque et modique d’un passé idéal. Le mot de paysage parle d’une aptitude humaine à construire partout et quel que soit le lieu, des formes singulières pour installer la vie. Il évoque, au delà de l’utile, la nécessité du juste et du beau dans la société humaine.
Pour engager les transitions nécessaires, il est urgent de mettre en place partout un paysage où chacun aura sa place et pourra la prendre.
La tribune et Paysage après pétrole à retrouver dans le Théma S'extraire du pétrole, en prévente ici.
A lire : Ouvrage, Paysages de l’après-pétrole, 7 expériences européennes. Éditions du Moniteur, juin 2021
