[THEMA] 40 ans de lutte pour la réhabilitation des « nuisibles »

Publié le jeu 13/04/2023 - 09:07

Par l'Association pour la protection des animaux sauvages (ASPAS)

En France, à la différence des animaux domestiques, les animaux sauvages en liberté ne sont pas considérés comme des êtres sensibles aux yeux de la loi : les émotions d’un sanglier, sa capacité à éprouver de la douleur, n’est reconnue que lorsqu’il est détenu en captivité, pas lorsqu’il se traîne au sol dans la nature à moitié défiguré par le tir approximatif d’un chasseur.

Selon si on est un loup, un blaireau, un renard, le statut juridique de l’animal varie : le premier est strictement protégé par la loi (en théorie…), le second figure parmi les espèces chassables, quant au dernier il est classé sur la liste des « ESOD » (« espèce susceptible d’occasionner des dégâts ») en plus d’être chassable… A ce titre, il persécuté sans répit 12 mois sur 12.

Une telle catégorisation administrative des animaux sauvages, en plus de soulever des problèmes éthiques, n’a surtout aucun sens sur le plan écologique ; dans une nature libre et sauvage, chaque animal a sa place en interconnexion avec les autres. Aucun animal n’est « nuisible » de nature ou pour la nature : il ne le devient que lorsqu’il a une incidence négative sur les activités humaines…

Certaines espèces indigènes sont classées ESOD sur une liste départementale par arrêté ministériel revu tous les 3 ans (une autre liste existe pour les espèces exogènes comme le ragondin, le raton-laveur ou le chien-viverrin), sur la base de déclarations de dégâts souvent farfelues et pas du tout vérifiées, réceptionnées et compilées au sein des préfectures, quand elles ne les sont pas par les chasseurs eux-mêmes… Le dernier arrêté en date court jusqu’en juin 2023 concerne 5 oiseaux et 4 mammifères : geai des chênes, étourneau sansonnet, pie bavarde, corbeau freux, corneille noire, belette, martre, fouine et renard. Avec leur étiquette ESOD, tous ces animaux peuvent être « détruits » (c’est le terme officiel) à l’aide d’une panoplie de pièges différents, souvent non sélectifs.

Depuis 40 ans, au nom de la cohabitation harmonieuse avec le Vivant, l’ASPAS s’est beaucoup battu contre ce piégeage de masse en prenant la défense des ESOD, en particulier le Renard roux, l’un des animaux les plus persécutés en France avec environ 600 000 individus tués chaque année par tir ou piégeage.

Si le renard est toujours injustement classé ESOD en 2023 dans une écrasante majorité de départements français, de belles victoires ont été obtenues par l’ASPAS en justice contre des arrêtés de destruction abusifs, mais aussi dans le débat public : de la vermine porteuse de rage et mangeuse de poules ou de perdrix, le goupil est devenu l’allié des agriculteurs (un renard peut chasser jusqu’à 5000 campagnols par an !), l’éboueur des campagnes (il prédate les individus faibles et malades et freine l’expansion de la maladie de Lyme), et même un planteur d’arbres (il participe à la dissémination des graines par ses déjections).

Pour inverser la logique macabre du classement ESOD, et faire pression sur le ministère de la Transition écologique avant l’adoption du nouvel arrêté triennal fin juin 2023, l’ASPAS a lancé une grande campagne dans les territoires pour recueillir des déclarations de NON-dégât auprès d’agriculteurs ou de propriétaires de basse-cours. Un poulailler bien fermé et c’est souvent un problème vite réglé ! Plus de 2 000 témoignages en faveur des renards et autres mal-aimés ont ainsi été réceptionnés.

Comment agir ?

Témoignages, pétition, consultation publique, soutien financier : pour aider l’ASPAS à réhabiliter les animaux considérés comme « nuisibles », rendez-vous sur aspas-nature.org/ESOD !

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