[ATD] Contrat d’engagement : les ambitions pour les jeunes précaires n’y sont pas

Publié le jeu 04/11/2021 - 10:05

Par ATD Quart Monde

Annoncé cet été, les contours du contrat d’engagement pour les jeunes ont été dévoilés par le Premier ministre ce mardi. ATD Quart Monde regrette que l’ambition ait été sacrifiée au profit des logiques budgétaires.

En trois mois, l'enveloppe dédiée à ce nouveau dispositif a en effet fondu, passant de 2 milliards d'euros à 550 millions d'euros. La cible a également été revue à la baisse, puisque 400 000 jeunes seraient concernés en 2022, soit moitié moins qu'initialement prévu. Pour rappel, la proportion des jeunes privés d’emploi reste presque deux fois supérieure à la moyenne de la population.

Force est donc de constater que les logiques budgétaires ont pris le dessus sur l’ambition d’apporter un revenu et un accompagnement digne pour les jeunes en situation de pauvreté.

Pour ATD Quart Monde, le contrat d’engagement tel qu’il a été présenté ce jour par Jean Castex, porte en lui les mêmes limites que celles qui ont déjà été observées avec la garantie jeune et d’autres dispositifs d’insertion à destination des jeunes les plus précaires : critères d’éligibilité trop contraignants, limite de temps qui ne permet pas de se stabiliser, manque de moyens humains pour aller rejoindre les jeunes les plus exclus et les plus éloignés de l’emploi. La garantie jeune, qui a pu être une solution intéressante pour certains, a en effet montré que le nombre de pièces justificatives, les entretiens, les horaires et les délais demeurent des freins pour les jeunes les plus éloignés.

En outre, la durée maximale du contrat d’engagement, fixée à 12 mois (renouvelable 6 mois sous conditions), reste un obstacle majeur à son succès. Pour ATD Quart Monde, une sortie rapide ne devrait pas être le but ultime d’un dispositif. Au contraire, pour les jeunes les plus exclus, ces limites de temps sont anxiogènes : elles ne permettent pas de se projeter dans une orientation choisie, ni d’accéder à un logement stable et sont contraires à l'engagement du gouvernement d'établir des parcours sans rupture. A un programme qui privilégie l’intensité, nous préférons insister sur la qualité et la globalité de l’accompagnement et la disponibilité des référents.

Par ailleurs, le gouvernement préfère désormais parler de "contrat d'engagement" plutôt que de "revenu d'engagement". Un changement sémantique qui en dit long, s’appuyant sur la logique de droits et devoirs, qui met une pression inutile et inefficace sur des jeunes qui n’ont souvent plus confiance dans les institutions et dont la situation de grande précarité demande de la souplesse.

Un revenu digne pour vivre et un accompagnement de qualité sont des besoins indispensables pour bâtir sa vie et assumer ses responsabilités. Comme l’énonce la Stratégie de lutte contre la pauvreté, l’État s’est engagé à « garantir un parcours de formation pour tous les jeunes ». C’est cette garantie, inconditionnelle, que nous devons à la jeunesse de notre pays.

Enfin, ATD Quart Monde dénonce le fait que ce contrat d’engagement ait été pensé sans les jeunes concernés. Pourtant, l’expérience a montré que la participation des personnes concernées est une condition incontournable de l’efficacité de toute politique publique. Les jeunes en grande précarité ont avant tout besoin qu’on prenne le temps d’écouter leurs aspirations et de construire avec eux leurs voies d’avenir.

Pour Marie-Aleth Grard, présidente d’ATD Quart Monde : « Ce contrat d’engagement, c’est une façon de sortir par la petite porte du débat sur l’ouverture du RSA aux moins de 25 ans. Ce qui est aujourd’hui proposé aux jeunes les plus précaires, c’est un nouveau dispositif, alors qu’ils aspirent à un droit auquel ils doivent avoir accès comme les autres. »

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