David Heckel, Cress Paca : « La loi Pacte minimise l'apport spécifique des entreprises de l'Economie sociale et solidaire (ESS) »

Publié le lun 22/10/2018 - 09:13

Le Projet de loi relatif à la croissance et la transformation des entreprises – ou loi Pacte – a été adopté en première lecture à l'Assemblée, au début de ce mois d'octobre. Le texte prévoit la création de « missions » sociales ou environnementales. Nous en avons discuté avec David Heckel, directeur de la Chambre régionale d'économie sociale et solidaire de Paca. La loi Pacte sera au cœur des discussions du prochain salon des achats responsables des entreprises, So Eko, à Marseille, le 8 novembre prochain.

Que peut changer la loi Pacte pour les entreprises de l'économie sociale et solidaire ?

Le premier constat que l'on peut faire concernant les entreprises de l’économie, sociale et solidaire (ESS), c'est le manque d'ambition de cette loi. Car elle n'adresse qu'une proposition qui concerne notre secteur : un élargissement de la possibilité des entreprises de bénéficier d'un agrément « ESUS » (Entreprise solidaire d'utilité sociale)1.

Par ailleurs, l'un des éléments clés de la loi Pacte est qu'elle introduit la notion d' « entreprise à mission ». Cela donnera la possibilité à une entreprise d'introduire une finalité sociale ou environnementale dans ses objets. Nous pouvons nous féliciter qu'il y ait une volonté de partager cette notion de responsabilité entre toutes les entreprises. En revanche, il est dommage que dans cette description de la responsabilité, la loi Pacte n'introduise pas les entreprises de l'ESS comme étant des acteurs agissant déjà dans cette logique. Elle minimise l’apport spécifiques des entreprises de l'ESS.

Cette possibilité pour des entreprises classiques d'avoir des objets sociaux ne risque-t-elle pas de diluer l'identité des structures de l'ESS ?

Lorsque la loi a été annoncée, en début d'année, beaucoup d'interrogations ont été exprimées à ce propos. Nous avons un peu avancé sur ce sujet. Ce point de vue demeure une stratégie défensive. Nous préférons considérer que nos entreprises ont été pionnières en matière de responsabilité économique dans les territoires. Elles ont donc des choses à faire valoir. Dans la loi Pacte, il y a bien cette introduction de la mission de responsabilité des entreprises. Mais rien sur le partage de la valeurs, sur le fait que des entreprises puissent être à lucrativité limité ou sans but lucratif, et rien non plus sur le partage du pouvoir et de la gouvernance : tout ce qui, de fait, distingue les structures de l'ESS des autres.

Nous n'avons donc pas l'impression que notre spécificité soit attaquée. Il faut que nous arrivions à nous faire entendre pour que, à partir de notre distinction, nous soyons à l'origine d'un effet d’entraînement, notamment pour les entreprises à mission.

Comment sera abordée la loi Pacte dans le cadre du salon So Eko, dédié aux achats responsables ?

Le sujet de la loi Pacte sera abordé en plénière, durant l'après-midi. La thématique générale sera la performance économique et les impacts sociaux et environnementaux des entreprises. Cette question de la responsabilité des entreprises vis-à-vis de leur territoire est un élément important de la loi.

Mais il faut souligner que le cœur du sujet de So Eko est la promotion des achats responsables, sur un territoire qui nous concerne : celui de la région Sud Paca. Aujourd'hui, des agents économiques se demandent si, dans leur manière de conduire leurs projets, une partie de leurs échanges économiques, notamment en matière d'achat locaux, peut bénéficier au territoire. C'est le cœur du salon.

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1L'agrément Entreprise solidaire d'utilité sociale (ESUS) est une reconnaissance par l'Etat d'un but d'utilité sociale poursuivit par une entreprise. Dans les faits, il leur permet de bénéficier de financements, et notamment d'accéder à l'épargne salariale solidaire et à des réductions fiscales.

 

 

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