UN CARMEN « ÉCO-CONÇU » AU FESTIVAL D'AIX-EN-PROVENCE

Publié le lun 17/07/2017 - 16:31

Soixante ans après sa dernière représentation au festival d’Aix-en-Provence, l’opéra Carmen est à nouveau donné au Grand Théâtre de Provence, depuis le 4 juillet. Le classique de Bizet est revisité par le metteur en scène Dmitri Tcherniakov, sur fond de décors entièrement éco-conçus. Une première !

Des décors impossibles à recycler, une utilisation à gogo de polystyrène, et 45 tonnes de déchets en 2013… Relativement méconnu, l’impact de l’opéra (et du spectacle en général) sur l’environnement n'est pas neutre. Un sujet dont le festival international d’art lyrique d’Aix-en-Provence a décidé de s'emparer. En 2012, un bilan carbone est réalisé à l’initiative de la direction. À l’issue de celui-ci, une centaine de pistes d’action sont identifiées, avec un objectif commun : réduire l’impact environnemental de la manifestation. Les responsables du festival se rendent compte que, parmi les 45 tonnes de déchets générées par l'événement, « 80% sont issus de la construction, du montage, du démontage et de la destruction des décors », précise Véronique Fermé, responsable des actions de développement durable au sein de la structure. Suite à ce constat, un tri à la source est mis en place, ce qui aboutit à une économie de 20% sur le traitement des déchets des ateliers de construction des décors.

L'éco-conception des décors nécessite beaucoup plus d'anticipation et d'organisation sur le cycle de vie des décors.
Crédits photo : Clément Vial

Un laboratoire pour l’éco-conception des décors

Mais, en 2014, le festival d’Aix-en-Provence fait mieux : dans le cadre d’un appel à projets de l’ADEME et de la région PACA sur l’appréhension des déchets, il se lance dans l’éco-conception des décors des spectacles qu'il produit. Accompagné par un consultant spécialiste du sujet, Pôle Eco-Design, l'organisation se met à travailler de façon différente. Le liège remplace le polystyrène, on abandonne la colle pour les vis, on collabore avec les prestataires de gestion des déchets, on passe à la peinture sans solvant, et, surtout, on réfléchit à tous les cycles de vie des décors. « Nous anticipons la fin de vie au moment de la conception. Avant, nous y pensions seulement à la fin », explique Véronique Fermé. L’idée, en résumé : mieux s’organiser pour produire moins de déchets. « Par exemple, on se pose la question des matériaux dès le départ. Le défi, c’est d’en trouver qui répondent à nos contraintes et soient les plus locaux possibles. Nous demandons aussi aux fournisseurs sils peuvent les récupérer à la fin de vie des décors. » Une démarche également intéressante d'un point de vue économique : si les matériaux  sont plus coûteux, l’initiative leur a finalement valu 8% d’économies pour Carmen, via la réutilisation et le recyclage de certains éléments, ainsi qu’une baisse de 15 tonnes de CO2.
 

Une révolution éco-responsable

Car, après 3 ans de tests et de préparation, la première de l’opéra de Bizet a bien eu lieu, mais cette fois-ci dans un décor entièrement éco-conçu. Une véritable révolution. « Nous avons changé complètement notre façon de travailler ; la manière de concevoir les décors est différente, nous avons réduit notre impact sur l’environnement et les coûts de fin de vie des décors, nous prenons davantage en compte la santé des constructeurs et des machinistes, et nous avons même mis en place une réflexion commune avec d’autres maisons d’opéra sur le sujet », se félicite Véronique Fermé. Cette dynamique n’est pas prête de s’essouffler. Un autre décor de ce type est en préparation pour l’an prochain, et une bourse entre différentes maisons d’opéra est en projet. Car, pour la responsable du développement durable au festival d’Aix, l’éco-conception est l’avenir de cette discipline artistique. « On va aller vers des décors de plus en plus éco-responsables. Le fait pour nous d’avoir relevé le défi montre aux autres que c’est possible, et qu’il faut le faire. C’est notre façon de préserver la planète, et, dans le cadre de la baisse des budgets dédiés à la culture, c’est une manière pour nous de  moins dépenser tout en montrant que le secteur culturel est source d'innovation. » Alors pour  voir un Carmen écolo, rendez-vous au Grand Théâtre de Provence jusqu’à la fin du mois juillet.
 
L’opéra Carmen, écrit par Georges Bizet et mis en scène par Dmitri Tcherniakov, sera donné au Grand Théâtre de Provence les 17 et 20 juillet, à 19h30.

Plus d’infos sur http://festival-aix.com/fr

 

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