Par Manon Le Dantec
Pour certains écologistes, le constat du mardi 16 mai 2023 est clair : en votant la proposition de loi transpartisane « pour un choc de compétitivité en faveur de la ferme France », les sénateurs ont tranché pour la compétitivité de la France, au détriment de l’environnement et de la santé des consommateurs.
C’est contre l’avis du gouvernement que mardi 16 mai le Sénat vote en faveur d’un nouveau projet de loi, la ferme France. Portée par Sophie Primas, sénatrice LR, et les rapporteurs Laurent Duplomb (LR), Pierre Louault (Union Centriste) et Serge Merillou (Socialiste) cette loi s’articule autour de 5 axes pour booster la compétitivité de l’agriculture française. En voulant tirer la sonnette d’alarme du marché français, les sénateurs font sonner les cloches du côté des écologistes.
Des ambitions controversées.
François Villerette, fondateur de l’ONG Génération Futures, dénonce un « contre-sens historique ». Parmi les 26 articles, plusieurs titillent. C’est le cas de l’article 8 qui autorise l’utilisation d’aéronefs pour pulvériser des produits phyto-pharamaceutiques sous arrêtés des ministres de l’Agriculture, de l’Environnement et de la Santé. Pourtant, comme le rappelle Alain Bazot, président de l’UFC Que choisir, « l’épandage aérien est interdit depuis 2009 par une directive européenne du fait de risques élevés de dispersion dans l’air à proximité des habitations. ». Les articles 15 et 16, sur la question de l’eau, interrogent aussi. Alors que les sécheresses se multiplient, la loi propose de modifier le code de l’environnement pour permettre des retenues d’eau, comme les contestées méga-bassines, pour « l’intérêt général »
À bat la surréglementation en matière agricole.
L’article 13 est lui aussi sujet d’inquiétude puisqu’il pourrait subordonner l’avis du ministre de l’Agriculture aux décisions de l’Anses (Agence nationale de sécurité sanitaire) sur des questions relatives aux produits phytosanitaires. L’actuel ministre, Marc Fesneau, a déjà, au nom de la souveraineté alimentaire, cherché à abroger certaines interdictions comme l’usage de la phosphine, herbicide pourtant classé « cancérigène suspecté » depuis 2022. Cet article pourrait alors avoir des répercussions sur la mise en marché de certains produits, nocifs pour la santé des consommateurs mais florissant pour le « lobby agricole » selon Alain Bazot.