Benoît Hamon : « Pour un contre-modèle coopératif ! »

Publié le lun 30/01/2017 - 14:47

 

Le premier numéro de Sans Transition !, consacrait un dossier à la reprise d'entreprises en statut coopératif. Benoit Hamon, ancien ministre à l’Économie sociale et solidaire (ESS) et désormais candidat du PS à l'élection présidentielle, nous avait accordait un entretien sur le sujet. 

ST : En France, 2700 entreprises coopératives et participatives, notamment les ScoP, emploient près de 51 000 salariés dans tous les secteurs d’activité. Pourquoi pensez-vous que ces entreprises doivent se développer davantage en France ?

BH : Il s’agit d’un modèle d’entreprise durable qu’il faut favoriser. J’en veux pour preuve une étude de 2013 de la direction du Trésor qui constate que les coopératives, dirigées par leurs propres salariés, vivent plus longtemps que leurs concurrents de même taille. Ceci ne tient ni de la philanthropie ni de la magie, mais du réinvestissement statutaire opéré. L’argent sort peu sous forme de dividendes et continue à être investi dans l’entreprise. C’est aussi grâce à une gouvernance partagée que sont prises des décisions plus patientes fondées sur l’emploi à long terme.

ST : Près de 7000 PME cherchent à êtres reprises chaque année et ce chiffre devrait s’accroître. En quoi la reprise en Scop, défendue dans votre loi sur l’économie sociale et solidaire (ESS) de 2014, offre-t-elle une solution viable ?

BH : Nous devons accompagner ces modèles entrepreneuriaux qui poursuivent moins une course effrénée de croissance et d’intérêts individuels, que le maintien de l’emploi, l’impact social et la protection de l’environnement, dans une perspective d’intérêt général. Dans le cadre de la loi ESS, nous avons créé la Scop d’amorçage, qui permet à des salariés-repreneurs durant 7 ans- d’être minoritaires au capital mais majoritaires en matière de droit de vote. Nous avions aussi imaginé un droit d’information des salariés lorsque l’entreprise est à vendre. La loi prévoyait une durée de 2 mois avant la signature du processus de vente, pour que les salariés aient le temps de formuler une offre. Mais M. Macron, désormais ministre de tutelle de l’ESS, a publié un décret qui est venu réduire la portée de la loi, prévoyant que ce droit serait réduit à 2 mois avant le transfert de propriété, alors qu’à ce moment là les entreprises auront déjà un acheteur potentiel... Conséquence : le droit d’information ne privilégie plus la reprise en coopérative par les salariés. Visiblement, M.Macron ne comprend pas ce modèle d’entreprise à lucrativité limitée.

ST : Outre les Scop, la loi ESS met l’accent sur d’autres formes de coopératives comme les sociétésd’intérêt collectif (Scic) qui peuvent également inspirer des reprises d’entreprises...

BH : Les Scic permettent de développer des formes de gouvernance public-privé, dans des domaines qui concernent par exemple les politiques de santé, la production d’énergie locale, les services aux personnes âgées, la petite enfance... Elles s’inscrivent également dans ce contre-modèle coopératif, au même titre que les Scop ou les coopératives d’activité et d’emploi (CAE). Le retour au plein emploi, au progrès social, ne peut pas passer uniquement par des start-up, des sagas individuelles, qui ne sont qu’une partie du modèle économique français. L’ESS innove et mérite d’être davantage valorisée.

 

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