Pourquoi les hommes préhistoriques ont-ils peint ces animaux dans ces grottes, de cette manière-là, au coeur du dernier âge glaciaire européen ? C’est l’une des questions qui taraudent la communauté des préhistoriens depuis deux siècles et qui suscitent les hypothèses les plus variées. Grâce à son expérience du pistage des grands mammifères en milieu sauvage, Baptiste Morizot renouvelle notre regard sur l’origine de cet art pariétal et libère nos lointains ancêtres du rôle écrasant de l’Artiste que des générations de chercheurs ont à tout prix voulu leur faire endosser.
En conceptualisant le “regard jizz” si familier des naturalistes contemporains, Baptiste Morizot parvient à raviver la manière d’être humain propre aux chasseurs paléolithiques. À une époque où les animaux sauvages n’étaient bien souvent que des silhouettes fugaces entraperçues dans les hautes herbes de la steppe froide, le jizz était cette expérience visuelle synthétique éprouvée au moment furtif de la saisie d’un style d’apparaître propre à chaque animal. Ce regard est aujourd’hui perdu, un art de voir désormais oublié.
Dans une prose superbe et un style argumentatif rigoureux et humble, plein de nombreuses références de diverses disciplines, Baptiste Morizot pointe un peu plus encore la crise de la sensibilité au vivant dans laquelle nous nous enfonçons jour après jour.