[THEMA EDITO] « N’est-il pas temps ? »

Publié le lun 04/07/2022 - 09:00

Par Magali Chouvion et Julien Dezécot

Dans une tribune parue fin mai dans l’Obs, à l’occasion de la journée mondiale de la biodiversité, architectes, professeurs d’université ou encore élus, réunis lors des Rencontres du Vivant et de la Terre à Rouen, appellent à « révéler la nature en ville ». Qu’attendons-nous pour la développer ? s’interrogent-ils à juste titre. Car désormais, près de 8 Français sur 10 vivent dans des villes, les 3/4 à l’échelle planétaire.
Car à l’heure de l’urgence climatique et de la 6e extinction des espèces, on vous la fait courte : la nature en ville, c’est gagner en résilience. Être en capacité d’amortir les chocs, si vous préférez. Faut dire qu’on en a bien besoin : événements météorologiques extrêmes liés au réchauffement climatique – chaleur et inondations notamment - et maladies environnementales principalement. 100 000 morts chaque année seraient dues à la pollution de l’air, rappelons-nous le. Et la nature en ville permettrait même de créer du lien social. Car voilà. Nous, pauvres humaines et humains, sommes plus enclin(e)s au bavardage et autre compagnonnage au cœur d’espaces verdoyants ! Un projet qui fait société, en somme.

Il est donc heureux de se rappeler, - via cette tribune et les articles que vous trouverez dans ce nouveau numéro -, que quelques arbres rafraîchissent bien mieux et de façon bien moins onéreuse que les climatiseurs qui s’accrochent à nos façades ! Sans parler du rôle essentiel de leur écosystème racinaire dans la régulation du cycle de l’eau, et de leurs feuilles dans la filtration et l’absorption des polluants et autre CO2. Dernière bonne nouvelle, et pas des moindres, la nature appelle aussi… la nature. Autrement dit, créer dans nos cités, des parcs, des forêts urbaines, des jardins potagers et autres coulées vertes bien pensées et bien gérées, permet de développer une biodiversité spontanée. Pour le plus grand plaisir du citoyen, amateur jardinier ou naturaliste. Ainsi que du gestionnaire, avec le retour des services rendus associés.

Devant tant de bénéfices, pourquoi diantre les choses n’avancent-elles pas plus vite ? Élément de réponse dans la tribune de l’Obs : «Les élus et décideurs méconnaissent fréquemment les potentiels des sciences du vivant et de la Terre : ils se montrent plus efficaces sur des questions d’énergie, de transport, d’équipements sportifs et pourtant… un stade de foot coûte beaucoup plus cher qu’un corridor écologique ! » regrettent Marc André Selosse du Muséum d’histoire naturel, aux côtés du philosophe Dominique Bourg et du jardinier-paysagiste Gilles Clément, parmi une quinzaine de signataires de renom. Une raison de plus pour appeler – au passage - à signer la pétition lancée par Cyril Dion pour une formation systématique des élus aux enjeux de la Transition.

Face à l’ampleur des crises auxquelles nous devons faire face, « n’est-il pas temps de mobiliser les 65 000 agents qui entretiennent le patrimoine naturel urbain ? » poursuivent-ils. Près de 10 fois le nombre d’agents dédiés aux forêts à l’ONF… Autant de mains pour une augmentation poussée de la nature en ville, qui permettraient d’accroître considérablement bien-être, santé et lien social de l’ensemble des citoyens ! N’est-il pas temps de faire travailler ensemble urbanistes et écologues ? N’est-il pas temps de proposer des loi cohérentes et transversales aux services, avec un même objectif de limitation et d’adaptation au réchauffement climatique, mais aussi de restauration du Vivant ? N’est-il pas temps de cesser nos absurdités ? N’est-il pas temps de proposer une qualité de vie digne pour tous ?

Dans ce numéro estival, nous dressons le constat d’une nature qui a longtemps perdu droit de cité mais qui désormais renaît dans nos villes, telle une herbe qui fend le bitume. Les solutions innovantes et prospectives, portées par des scientifiques, des élus, des associations comme la LPO ou FNE, ou encore des citoyens mobilisés sur leur territoire, sont explorées. Pourquoi pas favoriser à grande échelle la nature dans nos villes pour en faire des « villes-forêts » nourricières et protectrices, comme l’appelle de ses vœux le forestier et auteur Ernst Zürcher dans nos colonnes. Voici des voies de transition inclusives et inspirantes. Il est grand temps de remettre l’imagination et la nature au cœur de notre projet de vi(ll)e !

Le numéro d'été est disponible dans nos points de vente et dans le kiosque en ligne !

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