[AGRICULTURE] Dernière bouffée "cultivons des aliments, pas du tabac"

Publié le mer 31/05/2023 - 16:13

Par Manon Le Dantec 

Depuis 1987, l’Organisation Mondiale de la Santé (OMS) organise la Journée Mondiale sans tabac. Cette année, la journée porte le slogan « cultivons des aliments, pas du tabac ». À l’heure d’une crise alimentaire mondiale, réorienter les cultures vers la nourriture plutôt qu’alimenter une industrie nocive pour la santé et l’environnement semble être un point névralgique.

Selon le Programme Alimentaire Mondial (WFP), en 2023, 345,2 millions de personnes seront en situation d’insécurité alimentaire. En lien avec notre numéro précédent « Faire face et anticiper les chocs alimentaires », les exploitations doivent être repensées pour élargir la sécurité alimentaire. L’OMS propose en cette journée du 31 mai de sensibilisation et de lutte contre le tabagisme, de repenser l’utilisation des terres agricoles.

La culture du tabac

Devenu omniprésent, le tabac constitue une ressource cultivée dans plus de 124 pays. En 2020, cette culture représentait 3 millions d’hectares dans le monde, selon la FAO (Organisation des Nations Unies pour l’alimentation et l’agriculture). Selon l’OMS, en Afrique, les terres cultivables consacrées à la culture du tabac ont augmenté de 20% ces 15 dernières années. Ainsi chaque année, elle cause la destruction de 600 millions d’arbres dans le monde et 200 000 hectares de terres selon la FAO. Soit 5% de la déforestation mondiale.

Réorienter les cultures

Ces exploitations de tabac, pourraient être remplacées par des cultures de denrées. African Tabacco Control Alliance, lance en même temps que l’OMS une campagne « Nourris l’Afrique, pas les cigarettiers ». Cette culture fructueuse pour les industriels du tabac, l’est moins pour les populations qui souffrent d’insécurité alimentaire. Alors que de plus en plus de personnes risquent d’en être victimes, l’OMS prie les États membre de « mettre un terme à l’utilisation de terres fertiles pour cultiver du tabac », afin d’améliorer l’accès à l’alimentation. Ces terres en effet, « pourraient servir à nourrir 10 à 20 millions de personnes » selon Québec Sans Tabac.

Pas demain la veille

Mais cela nécessite l’aide des états. L’OMS appellent ceux-ci à « mettre fin aux subventions accordées à la culture du tabac, pour les réattribuer à des agricultures plus durables ». En effet, les subventions et les rémunérations rendent le tabac plus intéressant pour les producteurs. En Inde, selon la FAO, aucune autre culture n’est aussi rémunératrice : « Si les planteurs veulent diversifier leurs cultures, ils sont susceptibles de se heurter à des difficultés économiques ». Pourtant, selon l’OMS, dans le monde « l’industrie du tabac exagère son importance économique ». Ces terres ne sont pas non plus facilement convertibles puisque les produits chimiques de la culture du tabac dégradent les sols. Mais ces cultures, principalement implantées dans les pays à revenus faibles et intermédiaires, selon la FAO, sont aussi à l’origine d’un piège de « l’endettement ». Les cultivateurs ne peuvent en sortir, « la plupart des producteurs subissent des pertes qui perpétuent leur endettement auprès des entreprises », déplore Léonce Dieudonné Sessou, secrétaire exécutif de l'Alliance pour le contrôle du tabac en Afrique, qui appelle les États à accompagner les producteurs. La transition donc, se fera avec l’aide des gouvernements ou ne se fera pas.

 

Garantissez l'indépendance rédactionnelle et financière de Sans transition !