[SUPERMARCHE COOPERATIF] A Toulon, embarquez pour La Coop sur mer !

Publié le ven 08/01/2021 - 07:07

Crédit photo : La Coop sur mer

Par Julien Dezécot

À Toulon, plus de 400 citoyens lancent un supermarché coopératif. Ouvert en décembre dernier, cette grande surface propose des produits de qualité à tarif réduit, moyennant un investissement bénévole important de tous les copropriétaires. Reportage.

À la veille des fêtes de fin d'année et de l'ouverture de ce magasin atypique qu'est La coop-sur-mer, Isabelle, Dominique et les nombreux bénévoles toulonnais multiplient les réunions d'information en visioconférence. Objectif : expliquer, au plus grand nombre de citoyens, comment fonctionne leur supermarché coopératif, dont le projet a déjà attiré près de 400 coopérateurs.
Alors que l'enseigne vient juste d'être posée mi-décembre et que les linéaires se remplissent de produits de qualité, grâce aux coopérateurs et salariés qui œuvrent de concert, les derniers travaux d'aménagement de la surface de vente de 410 m² battent leur plein, avenue du général Pruneau à l'Est de Toulon, à deux pas de l'autoroute et à côté de l'écoferme de La Barre, entre la Rode et Saint- Jean-du-Var.

Un supermarché participatif

Pour pouvoir s'approvisionner dans le magasin, il faut devenir coopérateur de l'entreprise, en souscrivant des parts sociales : 100 € minimum ou 10 € pour les personnes bénéficiant des minima sociaux. Originalité ? Les coopérateurs - propriétaires du magasin, assurent 80 % des tâches courantes de la grande surface : caisse, mise en rayon, nettoyage, manutention. Soit 3 heures de participation bénévole par mois environ. Éléna, 23 ans en recherche d'emploi, est précisément en train de mettre des produits en rayon. Récemment coopératrice, elle a découvert le projet par sa mère qui faisait partie du groupement d'achat associatif au début de l'aventure. « Avant La coop', j'allais en grande surface classique où j'achetais peu de produits sains et naturels car je n'avais pas assez de budget. Ici, comme les produits sont de 20 à 40 % moins cher qu'ailleurs - grâce au travail bénévole, avec une marge réduite à 20 % environ pour payer les frais de structure - je peux davantage me fournir au magasin et je peux proposer des nouveaux produits en rayon ! », se réjouit-elle. Autre point fort : la convivialité. « On connaît les autres bénévoles. On discute. On tisse des liens. C'est aussi un espace de rencontres enrichissantes ! ».

Encadrés par une équipe réduite de 3 salariés, composée d'Isabelle, Valérie et Kim, les bénévoles œuvrent à leurs côtés pour la mise en rayon de produits éthique et équitables. « Ils s'inscrivent sur le mois avec leurs créneaux disponibles sur un forum en ligne, explique Kim, 30 ans, toulonnais salarié depuis novembre. Lui n'avait jamais travaillé en grande surface mais son expérience en hôtellerie – restauration lui a facilité la dimension relationnelle du poste. « Une fois inscrits, une quarantaine de bénévoles viennent chaque jour, soit 6 ou 7 par créneau horaire », explique-t-il. Un coopérateur capitaine fait le trait d'union entre salariés et bénévoles, afin d'organiser au mieux les tâches de chacun. Réception de livraison, mise en rayon de produits, passage en caisse… Chaque volontaire se propose pour l'une des tâches et travaille en autonomie, une fois formé par le capitaine. Ce dernier est lui-même accompagné par les salariés grâce à des fiches de postes.

Une idée venue d'outre-Atlantique

Co-fondatrice du projet, Dominique Tardy travaille au département du Var, sauf le vendredi où elle œuvre au supermarché coopératif dont elle a eu l'idée en janvier 2015. « Après avoir vu un reportage sur le premier supermarché du genre à New York, j'ai été emballée. J'ai contacté La louve à Paris pendant un an, un essaimage du projet américain, détaille Dominique. Ils ont accepté de m'ouvrir leurs dossiers et de partager la méthode coopérative mise en musique. »
Autrement dit, pouvoir répondre aux questions clés : Comment construit-on un tel projet collectif? Avec quels outils participatifs et quel budget ? Comment intègre-t-on les bénévoles ? Conclusion de cette étude : Dominique comprend que le projet sera « lourd à mettre en place, n'étant pas professionnelle de la grande distribution ». Puis un groupement d'achat et une épicerie associative expérimentale vont émerger pour avancer vers le grand saut coopératif.

À ses côtés désormais, deux fonctionnaires, un commercial, un orthophoniste, une psy clinicienne, une chargée de communication, une ancienne banquière en retraite, un salarié du bâtiment, plusieurs personnels de la défense… En somme, des forces vives bénévoles venues de tous horizons sauf de la grande distribution.

Dans ce contexte, le partage d'expérience et des formations à La louve à Paris s'avèrent primordiaux. Là-bas, comme à La coop-sur-mer désormais, des animateurs de groupe qui connaissent bien le projet, font partie du comité de pilotage (entre 14 et 24 pers). Une forme de conseil d'administration. « On est resté pendant 3 ans en association puis depuis juin dernier, à côté de cette structure, on a créé une société sous forme SAS, avec un agrément Esus signifiant que nous nous inscrivons dans une démarche d'économie sociale et solidaire », détaille Dominique. Une logique de gouvernance dans laquelle chaque personne, quel que soit son nombre de parts sociales, a droit à une voix lors de l'assemblée générale, lorsque les décisions stratégiques sont prises collectivement. « Si 400 coopérateurs nous ont déjà rejoints, souligne Isabelle qui a été la première salariée, on espère être trois fois plus dans un an ! »
D'ici quelques années, imagine Dominique, « j'espère que nous ne vendrons que des produits de qualité, locaux, cultivés sans pesticides et un maximum de produits en vrac. On souhaite devenir un acteur local majeur, en lien avec les collectivités, les agriculteurs. Pour leur proposer un débouché à prix juste et accompagner ainsi la structuration de la filière agricole varoise. »Un rêve en passe de devenir réalité.

Plus d'infos : lacoopsurmer.fr

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