[RAC] Loi Finances 2022 : Des engagements toujours insuffisants pour le climat

Publié le mar 21/09/2021 - 14:31

Par Réseau Action Climat France

Demain, le dernier Projet de loi de finances du quinquennat sera présenté en Conseil des ministres. Le bilan des actions engagées depuis 2017 reste pour le Réseau Action Climat en décalage avec l’urgence d’agir face aux impacts des changements climatiques qui se multiplient. L’ambition des financements et dispositifs qui ont été mis en place pour accompagner les ménages et certains secteurs d’activités n’est pas à la hauteur d’une transition écologique ambitieuse et juste.

Des aides à la rénovation énergétique insuffisantes

Le maintien en 2022 du niveau des aides pour la rénovation à environ 2 milliards d’euros montre une volonté de stabilité. Il sera toutefois nécessaire de revoir ce montant à la hausse les prochaines années. Les critères de performance énergétique donnant droit aux aides doivent également être repensés. En effet, le dispositif MaprimeRenov’, concerne principalement le changement des chaudières, une aide qui vise ainsi à produire du volume au détriment de rénovations plus efficaces et pertinentes. 

Un chèque énergie incomplet

La hausse ponctuelle de 100 € du chèque énergie est une bonne nouvelle qui permet de protéger de nombreux ménages de la hausse des prix des énergies. Mais elle est insuffisante pour amorcer un changement structurel : contre la précarité énergétique, une hausse du montant de ce chèque de 150 à 710 serait nécessaire. L’absence d’un chèque équivalent pour les carburants est regrettable, alors que de nombreux ménages n’ont accès à aucune alternative.

Ferroviaire : des investissements trop faibles

L’allocation d’une part importante du plan de relance au transport ferroviaire a permis d’amortir les dégâts liés à la crise sanitaire et de préserver des investissements déjà planifiés. Toutefois, ceux-ci demeurent trop faibles : 3 milliards d’euros supplémentaires par an seraient nécessaires pour atteindre nos objectifs climat. L'enterrement du rapport sur les trains d'équilibre du territoire et les petits pas en matière de train de nuit sont également regrettables.

Les aides à l’achat d’un véhicule : bonnes pour les ménages modestes, moins pour le climat

La prime à la conversion, qui permet l'acquisition d’un véhicule neuf ou d’occasion en échange d’un véhicule polluant, a été largement revalorisée, avec un investissement public atteignant presque 1,4Md€ en 2021. Toutefois, les véhicules acquis grâce à ce dispositif sont encore majoritairement essence et diesel. A l’avenir, il s’agira d’orienter cette prime vers les véhicules à faible émission, tout en diminuant les frais à charge des ménages les plus modestes, grâce à une “super-prime” pour les occasions et un prêt à taux 0.

Un malus sur le poids des voitures trop restrictif

Alors que la vente de SUV est passée de 5 à 36% des ventes de voitures en France ces 10 dernières années, le malus qui s’applique aux véhicules de plus de 1,8 tonne apparaît désormais bien trop restrictif. Afin d’inclure dans ce malus ces véhicules qui émettent en moyenne 20% de CO2 de plus qu’une voiture standard, le Réseau Action Climat propose de baisser ce seuil à 1,3 tonne avec un barème spécifique pour les véhicules électriques et hybrides rechargeables.

Plan vélo : L’Etat doit passer la seconde

3 ans après le lancement du plan vélo, plus de 60% des 350 M€ initialement prévus sur 7 ans pour co-financer le déploiement d’infrastructures cyclables sont déjà écoulés. Ce fonds apparaît ainsi sous-dimensionné au regard du besoin des collectivités. Les 100 M€ supplémentaires promis en 2021 seront insuffisants : pour doubler les infrastructures cyclables d’ici 2027, la France doit élever son plan d’investissement annuel à 500 M€. Une autre des mesures phares du plan vélo, le “savoir rouler à vélo” est également sous financée pour être mise en œuvre concrètement. Dernier levier nécessaire : généraliser le forfait mobilités durables, pour développer l’usage du vélo sur les trajets domicile-travail. 

Agriculture : Toujours aucune redevance sur les engrais azotés

L’usage des engrais azotés, représente 42% des gaz à effet de serre émis par le secteur agricole français. Malgré la proposition d’une redevance sur ces engrais par la Convention Citoyenne sur le Climat, nulle trace n’est trouvée dans la loi Climat et Résilience. Et le Projet de Loi de Finances 2022 évitera encore une fois cette question, en dépit du fait qu’une telle mesure serait bénéfique aux agriculteurs pour les accompagner dans l’usage de solutions alternatives (azote organique, engrais verts).

Plan de relance : l’économie d’abord, l’écologie ensuite

Si 30 milliards d’euros du plan de relance sont destinés à la transition écologique, la performance environnementale des projets financés est souvent reléguée au second rang. En témoignent notamment les milliards d’euros versés aux entreprises - y compris les plus grandes - sans contrepartie ni écologique, ni sociale. Si certaines très grandes entreprises doivent publier un reporting climat en contrepartie des prises de participation de l’Etat via l’Agence des participations de l’Etat (APE), cette mesure de la loi de finances rectificative de juillet 2020 reste très insuffisante et doit être renforcée et élargie. Le plan d’investissements “France 2030" qui complète le projet de loi de finances devra apporter de la visibilité sur l’argent public nécessaire pour concilier ambition climat et justice sociale.

Dépenses néfastes pour le climat et l’environnement : La France loin de ses engagements

Malgré de timides avancées comme une baisse de 2 c€/l pour le remboursement du diesel poids lourds et la mise en place d’une éco-contribution sur les billets d’avion, la France n’est pas sur les rails pour honorer son engagement pris au G7 de supprimer la totalité des subventions aux énergies fossiles d’ici 2025. Le décalage de la suppression du tarif réduit sur le gazole non routier (GNR) de 2021 à 2023 n’en est qu’un exemple. Il est urgent de fixer une date butoir avec des trajectoires et des mesures d’accompagnement spécifiques pour chaque dépense néfaste afin d’atténuer les impacts de leur suppression sur les ménages, l'emploi et les territoires.

Des financements insuffisants pour la transition des collectivités territoriales

Malgré une hausse d’un milliard d’euros des moyens attribués par l’Etat aux collectivités pour la transition, ce montant reste insuffisant. Sans hausse de ce budget, de nombreuses dispositions de la Loi Climat et Résilience ainsi que des Contrats de Relance et de Transition Écologique nécessitant une mobilisation humaine et financière des collectivités territoriales risqueraient de rester à l’état d’intention. Alors que l’impact de la crise sanitaire dans les comptes locaux est évalué à 5 milliards d’euros en 2020, l’Etat doit urgemment pérenniser, rehausser et suivre les financements attribués aux collectivités.

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