PERTURBATEURS ENDOCRINIENS : quels risques pour la santé ?

Publié le ven 13/10/2017 - 21:27

Publi-rédactionnel 

 

Une conférence sur les perturbateurs endocriniens était organisée par Sans Transition !, Harmonie Mutuelle et l'Université de Bretagne Sud (UBS), le 12 octobre dernier, à Vannes. François Veillerette, porte-parole de l'association Générations Futures, est notamment intervenu lors de ces échanges. Retrouvez, ci-dessous, les points de vues et éclairages de plusieurs intervenants lors de l'événement. Bientôt en ligne : les vidéos des table-rondes (également à retrouver dans les émissions Sans Transition ! diffusées sur Tébéo et TébéSud) et cinq interviews complémentaires.

 

 

Virginie Malnoy, Directeur général adjoint en charge de la région Bretagne-Normandie Harmonie Mutuelle

 

« Harmonie Mutuelle, en tant qu’acteur de la protection sociale, milite pour un accès à la santé pour tous et souhaite donner la possibilité à chacun de maîtriser sa propre santé en développant la prévention. Pour cela, il est important d’informer le plus largement possible sur les risques inhérents à notre environnement et à nos comportements. La connaissance est la première étape pour permettre la prise de conscience puis la transformation des comportements. Pour cela, nous avons certes besoin d’actions collectives mais nous pouvons également agir de façon individuelle. Car n’oublions pas que nous sommes les premiers acteurs de notre santé et qu’en changeant nos propres habitudes, nous pouvons améliorer sensiblement notre qualité de vie sur le long terme. Les perturbateurs endocriniens sont un enjeu majeur de santé publique et il est ainsi important pour Harmonie Mutuelle de prévenir le grand public de l’impact de leur utilisation sur la santé. Il ne s’agit pas là de fustiger certains produits mais bel et bien de trouver des alternatives à leur recours. Et il en existe. Ces perturbateurs altèrent le fonctionnement de notre système hormonal et provoquent de nombreuses pathologies. Leur découverte est récente. Il est donc primordial de s’intéresser dès à présent à ce sujet pour se prémunir des complications futures, en ayant toujours à l’esprit qu’il vaut mieux prévenir que guérir. »

 

Chiffres clés :

• 1000 produits cosmétiques sur le marché contiennent des substances « préoccupantes », dont des perturbateurs endocriniens, selon l’UFC Que Choisir (2017)

• 600 pesticides autorisés contiennent des perturbateurs endocriniens, selon une liste diffusée par l’État, en juillet 2017

• 157 milliards d’euros par an : c’est le coût – estimé par 18 chercheurs en 2015 – des méfaits des perturbateurs endocriniens en Europe

 

Tribune - Dr LOUIS-JEAN CALLOC’H, médecin généraliste et conseiller santé pour Harmonie Mutuelle

« L’exposition répétée génère le risque ! » « Il faut informer les gens à propos des perturbateurs endocriniens. Car chacun risque d’être touché par ces pollutions environnementales. Si des dérivés de produits de synthèse se trouvent dans nos organismes, nous sommes porteurs d’une pollution intime. Il faut donc une pédagogie de santé publique sur ce sujet. Pour que les gens comprennent que, même si seuls quelques microgrammes de phtalates ou de bisphénols sont présents dans les plastiques, cosmétiques ou produits ménagers, c’est l’exposition répétée qui génère le risque. Ainsi s’explique le fait qu’on observe chez l’homme une hausse des maladies dégénératives, que des jeunes filles ont une puberté précoce, que l’on constate une baisse du taux de fécondité chez les hommes. »

 

Interview : « L’UBS traque les perturbateurs endocriniens »

Véronique Le Tilly est enseignante chercheuse en biologie à l’Université Bretagne Sud (UBS). Son laboratoire détecte les perturbateurs endocriniens dans les cosmétiques et autres produits finis.

Qu’est-ce qu’un perturbateur endocrinien ?

Une substance pouvant modifier le fonctionnement du système hormonal. Celles-ci peuvent altérer le développement du foetus, la reproduction, le métabolisme et générer des cancers. Nous travaillons sur les perturbateurs à activité oestrogénique (oestradiol, hormone sexuelle femelle), présents dans les produits cosmétiques.

Dans quels types de cosmétiques les trouve-t-on ?

Les filtres UV des crèmes solaires peuvent être des perturbateurs endocriniens. Il faut éviter d’en mettre beaucoup. Les gels douche ou shampooings qui contiennent des émulsifiants ou conservateurs sont à éviter. Même s’ils ont tendance à contenir de moins en moins de perturbateurs endocriniens. L’utilisation de cosmétiques bio limite les risques.

Quels protocoles avez-vous mis en place pour repérer ces substances ?

Nous avons un outil cellulaire, un organisme génétiquement modifié, qui produit la cible cellulaire des perturbateurs endocriniens à activité oestrogénique. En leur présence, on observe une dérégulation cellulaire que nous mesurons. Nous possédons aussi un outil moléculaire qui mesure l’interaction directe entre ces perturbateurs et cette cible.

 

Changer ses habitudes pour une meilleure santé - par Harmonie Mutuelle

« Accompagner les gens tout au long de leur vie. » C’est la première promesse que fait Harmonie Mutuelle à ses adhérents. « De la naissance à la préparation de la retraite, nous proposons à nos adhérents de réfléchir sur leurs comportements », assure Robert Jaray, responsable de la prévention de la région Bretagne Normandie. Dans ce cadre, et à l’initiative des élus de la mutuelle, la prévention face au danger des perturbateurs endocriniens est abordée par différents programmes nationaux et locaux. « Le programme La Santé de votre enfant s’adresse aux parents, de la maternité aux six premières années de l’enfant. Il s’agit d’aider les familles à mieux connaître les produits ménagers, cosmétiques et alimentaires pouvant contenir des perturbateurs et de concevoir des produits avec des ingrédients sains (huiles essentielles, bicarbonate, vinaigre blanc…) », indique Robert Jaray. Le dispositif La Santé gagne l’entreprise aborde le sujet du « manger plus sain » (circuit court et produits locaux souvent moins manipulés et pollués). L’objectif ? « Faire comprendre à nos adhérents qu’en modifiant quelques habitudes, on peut avoir un gain important sur sa santé », résume Robert Jaray.

 

Zéro-phyto : le réseau Bruded précurseur

Les produits phytosanitaires (pesticides, engrais chimiques…) sont interdits dans les espaces publics depuis le 1er janvier 2017 par la loi « Labbé ». De nombreuses communes et intercommunalités du réseau Bruded ont banni ces substances contenant des perturbateurs endocriniens bien avant cette date fatidique. Bruded rassemble 140 municipalités et communautés de communes rurales engagées dans le développement durable. « Lors de la création du réseau, en 2005, des adhérents étaient déjà passés au zéro-phyto », indique Mikaël Laurent, salarié de la structure. Via le partage d’expériences permis par Bruded, les bonnes pratiques se diffusent. Végétalisation par des plantes couvre-sols, paillage ou invention de matériel de désherbage mécanique sont autant d’actions mises en place. Plouër-sur-Rance (22) a fait breveté la « Plouarsette », désherbeur monté sur un tracteur- tondeuse. Et Saint-Aubindu- Cormier (35) a végétalisé son cimetière avec un paysagiste. Une dynamique récompensée : une cinquantaine d’adhérents du réseau avaient reçu le trophée zérophyto lancé par la région Bretagne avant la loi Labbé.

 

PERTURBATEURS ENDOCRINIENS : l’Europe à la croisée des chemins

Par François Veillerette, directeur de l’association Générations Futures

Aujourd’hui, tout le monde ou presque a entendu parler des perturbateurs endocriniens. Mais de quoi s’agit-il ? Ce nom barbare sert à désigner des substances chimiques ou métalliques qui, même à des doses très faibles, peuvent perturber le bon fonctionnement de notre système hormonal, appelé aussi système endocrinien. Problème : on s’aperçoit maintenant que ces substances sont présentes partout autour de nous. Dans les aliments que nous mangeons – car de nombreux pesticides sont des perturbateurs endocriniens –, dans les plastiques qui peuplent notre quotidien, dans notre mobilier, dans nos ustensiles de cuisine et jusque dans le maquillage que nous appliquons sur notre peau ! Si la découverte de ce phénomène est récente (elle remonte en gros au début des années 70), les connaissances scientifiques s’accumulent de plus en plus rapidement et montrent le lien entre l’exposition des organismes les plus sensibles (foetus, jeunes enfants…) à ces perturbateurs et une liste impressionnante de pathologies chroniques, comme certains cancers, des maladies du métabolisme, des difficultés d’apprentissage mais aussi des malformations génitales ou l’infertilité. Ces maladies ont un coût sociétal énorme : plus de 150 milliards d’euros par an en Europe ! Forte de ces nouvelles connaissances, l’Europe s’est dotée en 2009 d’une nouvelle réglementation sur les pesticides prévoyant de retirer du marché, a priori, les produits perturbateurs endocriniens pouvant impacter la santé humaine. Malheureusement, cette législation qui aurait pu constituer un réel progrès en matière de prévention sanitaire risque fort de ne produire que peu d’effets. Les critères techniques qui serviront à appliquer la législation adoptée début juillet exigent en effet un tel niveau de preuves que, dans les faits, bien peu de substances finiront par être réellement interdites. De plus, des dérogations à l’interdiction sont prévues ! La France, jusqu’alors à la pointe dans ce dossier, a changé de pied et a soutenu ces critères. Il nous faut donc toutes et tous continuer à interpeller nos responsables, pour que la menace réelle des perturbateurs endocriniens soit enfin prise au sérieux !

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