[BRETAGNE] Lettre adressée aux élu(e)s régionaux-ales à propos des Plans Algues Vertes

Publié le jeu 13/10/2022 - 09:33

Par Sauvegarde du Trégor Goëlo Penthièvre

Monsieur le Président, Mesdames et Messieurs les conseiller(e)s régionaux-ales,

Présidence de Région

35000 Rennes

Monsieur le Président, Mesdames et Messieurs les conseiller(e)s régionaux-ales,

votre assemblée se prononce ce vendredi 14 octobre sur la troisième série des plans algues vertes, dit PLAV 3 présenté par les préfets des Côtes d’Armor et du Finistère. C’est à cette occasion qu’au nom de notre association, je m’adresse à vous. 

Ces plans concernant toujours huit baies bretonnes ne sont que la reprise déguisée des plans précédents qui ont fait l’objet de critiques sévères de la Cour des Comptes et du Sénat. Dans leur rédaction, les recommandations de ces institutions de la République ont été délibérément écartées ou tronquées. 

Ainsi, les objectifs de parvenir à terme à une eau de moins de 5 à 10 mg/l de nitrates dans ces rivières à baies à algues vertes sont désormais ignorés. Ce seuil de déclenchement a été clairement établi par les chercheurs de l’Ifremer, Alain Menesguen et Jean-Yves Piriou, confirmés par les actes d’un colloque à Ploufragan en 1999 et validés définitivement par la méta-étude menée sur le sujet par Monsieur Chevasus-au-Louis, ancien directeur de l’INRAe en 2012. En 2007 le Tribunal Administratif de Rennes a même donné force de loi à ce seuil par un jugement confirmé ensuite en 2009 à la Cour d’Appel de Nantes. En ne le retenant pas comme la base sur laquelle fonder l’objectif à atteindre pour en finir avec les excédents d’azote qui, parvenus à la mer, sont la cause directe de la prolifération massive des algues, les pouvoirs publics créent les conditions d’un échec à venir de ces plans à l’instar des précédents.   

La faiblesse des moyens mis en œuvre dans ces nouveaux plans est la suite logique du refus de prendre en compte les vrais enjeux d’une lutte efficace contre cette pollution toxique d’un demi-siècle. Ce PLAV 3 se réduit à un programme affiché et pleinement assumé de lutte contre les fuites d’excédents d’azote, sans jamais remettre en cause les modes agricoles intensifs hors-sols qui en sont à la source. 

Or, aucune mesure agro-environnementale envisagée dans ces plans ne pourra empêcher des fuites de nitrates dans le milieu si certaines cultures et certains modes d’élevage perdurent. Une plante comme le maïs, si vertueuse que soit sa culture, relargue suffisamment d’excédents de nitrates pour alimenter la prolifération algale. Ce ne sont donc pas quelques talus ou haies dressés à la hâte quand des milliers de kilomètres sont encore abattus, ou des rotations de cultures de maïs tous les trois ans qui permettront de parvenir sous le seuil de déclenchement des algues. C’est cette culture elle-même qu’il faut d’abord avoir le courage de remettre en cause, avec ensuite celles des céréales pour l’alimentation animale, toujours accompagnées d’épandages de lisier et autres déjections animales. Ces plans se gardent bien d’envisager ce scénario de rupture, même étalé sur le long terme... 

De surcroît, ces cultures et ces modes d’élevage hors sols sont la composante essentielle de tout un système agricole qui pollue l’air, l’eau et la terre à coups de pesticides et qui produit 44 % des gaz à effets de serre en Bretagne. 

Parce que la lutte contre les marées vertes est consubstantielle à celle contre le réchauffement climatique, donner votre accord à ce PLAV 3, non seulement vous condamnerait à assumer son échec prévisible et le gâchis financier qui s’en suit, mais de surcroît discréditerait votre parole publique quand vous afficherez votre engagement en faveur du climat.

Monsieur le Président, Mesdames et Messieurs les conseiller(e)s régionaux-ales refusez de donner carte blanche aux initiateurs de ces plans. Ne condamnez pas plus longtemps la Bretagne à être souillée sur ses côtes. Pour que nature ne meurt plus longtemps sur des hectares de littoraux, pour lever la menace constante d’accidents mortels d’hommes et d’animaux, pour retrouver une eau pure en mer et en rivières, dites non à ce PLAV 3. Votre refus obligerait l’État à revoir sa copie et interrogerait tous les acteurs et actrices de la filière agro-alimentaire.

Enfin, au moment du tournage d’un film sur le sujet après le succès d’une bande dessinée, qui l’un comme l’autre ne donnent pas le beau rôle à l'institution dans laquelle vous siégez, plutôt que de cultiver l’illusion de nourrir le monde, donnez plutôt au monde une autre image de notre région, celle d'une Bretagne, fière, belle, libre. 

Soyez assuré(e)s Monsieur le Président, Mesdames et Messieurs les conseillers régionaux-ales de ma considération et de celle de tous les membres de notre association. 

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