Une partie de la droite soutient le projet de loi travail

Publié le mar 01/03/2016 - 16:07

Le projet de loi El Khomri, visant à réformer le droit du travail, sera présenté en conseil des ministres le 24 mars, a annoncé lundi matin le Premier ministre Manuel Valls. Ce report d'une quinzaine de jours entre dans un contexte de vive contestation populaire, syndicale, étudiante et aussi d'une partie de la gauche. Paradoxalement, le projet de loi est soutenu par une partie de la droite et plusieurs organisations patronales, dont le Medef.

Sur le site Internet Change.org, la militante féministe et ancien membre du PS Caroline de Haas a lancé une pétition pour le retrait du projet de loi sur le droit du travail, dont la présentation en conseil des ministres a été reportée au 24 mars prochain. Elle a presque atteint les 850 000 signataires. La "contre-pétition", favorable au projet, vient, elle, de la droite. Elle a été mise en ligne sous l'impulsion de Dominique Reynié, conseiller régional à la tête du groupe Les Républicains-UDI dans la région Languedoc-Roussillon-Midi-Pyrénées et ex-tête de liste Les Républicains (LR) dans cette même région lors du dernier scrutin régional. Elle n'a pour l'instant recueilli qu'un peu plus de 12 000 signatures. "Oui à la Loi travail ! Non au chômage !" est-il clamé sur la page d'accueil de la pétition.

Dans le journal L'Opinion, 17 parlementaires Les Républicains (LR) et UDI ont signé une tribune favorable au texte. Ils la voteront "si elle n'est pas édulcorée", rapporte le quotidien. Le projet de loi El Khomri, ministre du Travail d'un gouvernement socialiste, connait donc un fort soutien de la droite. Alors que, simultanément, le texte est très critiqué à gauche et au sein même du PS. 

Le Medef en renfort

Du côté des partenaires sociaux, seuls les organismes patronaux accueillent favorablement le projet. Et le Mouvement des entreprises de France (Medef) fait aussi partie de ses défenseurs. Il en est même un soutien actif : sur Twitter, le député frondeur du PS Benoit Hamon a diffusé une lettre qu'il a reçu de l'organisation patronale. Elle y défend un projet de loi "ambitieux", "susceptible de faire bouger les lignes sur le front de la création d'emplois". Elle se permet même quelques propositions qui pourraient compléter "de manière pertinente" la loi, comme par exemple la "sécurisation de la lettre de licenciement afin d'éviter les condamnations pour seul vice de forme devant les prud'hommes". Le but évident : convaincre le député de voter en faveur de la loi. "Pincez-moi", a commenté avec ironie Benoît Hamon.

Contestation populaire et syndicale

Les représentants des salariés n'ont pas attendus longtemps pour exprimer leur opposition au projet de loi. Une large intersyndicale s'est rassemblée mardi 23 février (CFDT, CGT, Sud, Unef, Unsa, CFE-CGC, FSU...) contre le texte. Il en est ressorti un communiqué, intitulé "le droit collectif n'est pas l'ennemi de l'emploi". Une nouvelle réunion est prévue jeudi 3 mars. Et, ce mardi 1er mars, plusieurs organisations jeunesse, dont le syndicat étudiant Unef et le Mouvement des jeunes socialistes (MJS), ont lancé un appel à la grève pour le 9 mars. Elles suivent la date de l'événement Facebook "citoyen et militant" auxquels "participent" déjà 45 000 personnes.

La contestation du projet de loi a aussi pris une tournure inattendue. Un collectif de "youtubeurs" a mis en ligne une vidéo (visionnée plus de 1,3 million de fois) invitant les internautes à raconter leurs anecdotes au travail : "Quand on t'a demandé quelque chose d'impossible ou absurde", "qu'on t'a refusé un boulot pour des raisons injustes", etc. Les témoignages, nombreux, affluent, et la parole se libère. L'inquiétude et la colère ne s'expriment plus uniquement dans la rue, mais aussi sur la toile.

 


La présentation du projet de loi retardée pour favoriser la "concertation"

Le projet de loi pour réformer le code du travail, porté par la ministre du Travail Myriam El Khomri, devait être présenté en conseil des ministres le 9 mars. Il est reporté au 24 mars pour "corriger ce qui doit l'être", selon les termes du Premier ministre Manuel Valls. Les syndicats se sont notamment plaints d'un manque de concertation. Le gouvernement entend rectifier le tir à ce niveau. Le texte a déjà changé de nom : ce n'est plus le projet de loi "visant à instituer de nouvelles libertés et de nouvelles protections pour les entreprises et les actifs" mais l'avant-projet de loi "pour les entreprises et les salariés". Son adoption définitive est prévue "avant la suspension estivale des travaux parlementaires".

Les principales critiques du projet de loi portent sur plusieurs points :

  • Le temps de travail est assoupli : la durée maximale de travail journalier peut passer de 10 à 12h dans le cadre d'un accord collectif.

  • La durée hebdomadaire de travail pourra atteindre 60 heures, après accord de l'inspection du travail.

  • Après un accord collectif, la rémunération des heures supplémentaires pourra connaître une majoration minimale de 10%, contre un seuil minimum légal de 25% actuellement.

  • Des licenciements économiques pourront être prononcés dès lors que l'entreprise connaît des difficultés financières pendant plusieurs trimestres consécutifs. Les syndicats dénoncent en particulier le "flou" de cette mesure, imprécise, et laissant un large choix d'appréciation à l'entrepreneur.

 

 

Crédit photo : Pixabay.

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