[ARCHIVE] - GENEVIEVE AZAM : "Le couvercle de la Cop 21 est déjà refermé"

Publié le mer 23/08/2017 - 10:09

Débute aujourd'hui l'Université d'été européenne des mouvements sociaux organisée par le collectif altermondialiste Attac. Un événement dont nous sommes partenaire. Vous pourrez d'ailleurs nous y retrouver le jeudi 24 et le vendredi 25 août.

A cette occasion, nous republions une interview de Geneviève Azam - économiste et porte-parole d'Attac - réalisée au printemps 2016, quelques mois après la Cop 21. Il était alors déjà question d'une loi travail et d'un certain Emmanuel Macron...  

Plusieurs mois après Cop 21, quel bilan faîtes-vous de l’accord obtenu ?

Je ne vais pas revenir sur le contenu du texte qui a été largement commenté. L’accord relève d’une certaine adresse diplomatique. En revanche, d’un point de vue du contenu, il n’engage pas véritablement les pays à effectuer les transitions nécessaires. D’ailleurs, très vite après la Cop 21, des pays ont pris des décisions Geneviève Azam © LMDP qui vont à l’encontre de ce qu’il faudrait faire. Je pense notamment à l’Australie qui a autorisé l’extension d’un port de commerce en face de la grande barrière de corail. Barrière de corail qui est extrêmement menacée... Ce port est destiné à l’exportation du charbon alors que, au contraire, il faudrait laisser 80% des énergies fossiles sous terre. Je pense aussi aux États-Unis où le Sénat remet en cause l’accord d’Obama, déjà très timide, sur les changements climatiques. On pourrait citer bien d’autres exemples. Notamment celui de la France : nous discutons encore de l’aéroport de Notre-Dame-des-Landes dans un imbroglio juridique extraordinaire alors que la décision la plus sage après les accords de Paris serait de diminuer drastiquement le trafic aérien. Et ça n’est pas en construisant des aéroports de ce type que l’on va réduire le transport aérien. Tout cela est très grave ! Nous aurions pu imaginer qu’un élan positif allait être engagé après le succès diplomatique de la Cop 21. Mais le couvercle a déjà été refermé..

Pourtant, il n’y a jamais eu autant d’écologistes au gouvernement, avec trois ministres nommés récemment. Est-ce un effet d’annonce ? Ou espé- rez-vous qu’il y ait une meilleure prise en compte de l’écologie par l’exécutif ?

Malheureusement, je ne pense pas que l’entrée des écologistes - ou désignés comme tel - au gouvernement signale un quelconque tournant vis à-vis de l’environnement. Ces personnes occupent des postes importants mais cela ne correspond pas à un changement, à une réorientation plus écologiste du gouvernement. Ce dernier n’a jamais eu de préoccupation en la matière. Et près d’un an avant les élections présidentielles, je ne crois pas que Jean-Vincent Placé soit entré au gouvernement pour des motifs écologistes. Au moins lui. Je ne parle pas pour les deux autres.

Sur le plan social, Macron s’impose. La contestée loi travail est en discussion... Tout cela ne vous laisse pas indifférente ?

C’est de l’ordre de l’incroyable. Il faudrait une mobilisation importante en réaction à tout cela. On nous prépare une déconstruction du droit du travail comme il n’y en a pas eu depuis Pétain ! Ils sont arrivés à faire ce que Nicolas Sarkozy n’est pas arrivé à mettre en place lorsqu’il était au gouvernement. Il y a un effet de sidération face à cela. Car même si l’on avait peu d’espoir de la part d’un gouvernement socialiste, nous pensions que sur un certain nombre de valeurs, il y aurait des digues. Mais toutes les digues ont sauté : que ce soit sur le plan social, écologique ou encore démocratique. Nous retrouvons peut-être ici la gauche d’après 1947 qui a mis un certain nombre de sujets sous la table. Qui, notamment au travers de la décolonisation, n’a pas été exempte de toute erreur politique grave. Le PS, en 1971, après le congrès d’Épinay, revient de loin. On retrouve aujourd’hui de vieux démons de la gauche.  

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