[L'HUMOEUR DE MARGUERITE] Mikado, sudoku et histoire antique revisitée

Publié le mer 13/04/2022 - 12:00

Une fois par mois, Sans transition! publie une chronique : "L'humoeur de Marguerite". Ce mois-ci, Marguerite décrypte l'absence de réaction publique face à la sortie du dernier rapport du GIEC.

Porteurs d’une vertu pédagogique, le mikado et le sudoku devraient être enseignés et pratiqués à l’école. En effet, ils démontrent de manière ludique et métaphorique que la cohésion et la survie d’un ensemble dépendent du rôle de chacun de ses éléments constitutifs et des interactions entre ces éléments.

L’effet papillon est une théorie selon laquelle un battement d’ailes de papillon au Brésil peut provoquer une tempête au Texas. L’expression, créée en 1972 par le météorologue Edward Lorenz, explique qu’un infime changement d’un paramètre dans un modèle météorologique génère l’amplification progressive de celui-ci et provoque à long terme des bouleversements importants. Cette notion ne concerne plus seulement la météo mais s’applique également à d’autres domaines dont l’économie, l’environnement ou la santé.

Puisqu’on parle de santé, le concept de One Health nous rappelle la nécessité d’une approche holistique et inter-disciplinaire en santé animale, humaine et végétale parce que le monde du vivant est constitué d’organismes de toutes tailles et de toutes espèces qui ont, directement ou indirectement, une incidence les uns sur les autres et donc sur l’ensemble des êtres vivants. Etonnamment, cette vérité fait l’objet d’une prise de conscience collective fort tardive. Une des dernières inquiétudes en date concerne la récente grippe aviaire. Plus de 15 millions d’animaux ont déjà été abattus en France dans des conditions de souffrance dénoncées par l’association de protection animale L214 et l’on espère que l’éventuelle mutation du virus ne le rendra pas zoonotique (transmissible à l’homme) comme l’étaient H5N1 en 1997 et H7N9 en 2013.

En parlant de découvertes étonnamment tardives, la valise à roulettes fut lancée des années après que Neil Armstrong a posé le pied sur la lune, comme si la main du hasard intervenait en protestant que l’homme ne se rend pas toujours à l’évidence.

S’agissant d’évidences (et de regarder ailleurs alors que la maison brûle, pour paraphraser Jacques Chirac), les rapports du GIEC, désormais équipés d’un gyrophare et comprenant des solutions rédigées en lettres majuscules avec le sang de leurs auteurs, passent beaucoup trop inaperçus. L’un des phénomènes qui explique ce désintérêt s’appelle mithridatisation, la prétendue immunisation lente vis-à-vis d’un produit toxique par ingestion de doses croissantes de ce produit.

Nul ne sait si le roi Mithridate VI (né en 135 ou en 132 av. J.-C. et mort en 63 av. J.-C.) jouait au mikado ou au sudoku, mais sa lubie d’immunisation par ingestion de petites doses de poison s’est avérée saugrenue. De plus, sa vie ne se termina pas très bien. Une hypothèse de son décès veut qu’il ait tout bonnement été tué par les hommes de son fils Pharnace qui s’était emparé du pouvoir. Une autre explique qu’en assistant au couronnement de son fils, Mithridate aurait tenté de se suicider en absorbant du poison mais qu’il échoua, soit parce que la quantité était trop faible car il avait partagé le poison avec deux de ses filles (Mithridate était également connu pour son sens du partage), soit parce qu’il était immunisé, à force d’absorber de petites quantités de poison. (Comme nous l’avons déjà signalé, ces explications sont totalement farfelues). Ayant vainement tenté d'en finir en se jetant sur son épée et en découvrant à cette occasion que l’escrime n’est pas un sport que l’on peut pratiquer seul, Mithridate sollicita l'aide de son fidèle garde du corps Giecus pour l'achever.

Ayant tué son employeur, Giecus se retrouva au chômage car, bizarrement, personne ne voulait de lui comme garde du corps. Après une reconversion en permaculture, il devint maraîcher, contemplant matin et soir le ciel, le soleil et les nuages. Pendant son temps libre, Giecus rédigea, peu de gens le savent, Il n’est pire aveugle que celui qui ne veut pas voir, fable paradoxalement visionnaire.

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